Estimation générale du risque dans des jeux de hasard

Variance et inégalité de Bienaymé-Tchebychev

L'espérance est le gain moyen qu'on obtiendra si on recommence un grand nombre de fois le même pari, dans les même conditions D'une certaine façon, l'espérance efface les effets du hasard et montre si une stratégie est gagnante, ou non, en elle-même.
Néanmoins, le hasard est bel et bien présent, et il faut s'attendre à des fluctuations des gains autour de cette valeur espérée.
Par exemple, il est impossible de nier l'existence de mauvaises séries: des pertes qui s'enchaînent successivement. Il ne faut pas le nier, certes, mais cela n'empêche pas de l'analyser et d'évaluer la probabilité, et l'ampleur, de tels bad run. L'inégalité de Bienaymé-Tchebychev est une formule mathématique qui permet justement d'estimer la probabilité de la dispersion des résultats aléatoires, des fluctuations autour de l'espérance.


Espérance et variance

L'espérance et la variance sont des notions statistiques et probabilistes fondamentales.
En probabilité, l'espérance donne la moyenne des résultats vers laquelle on va tendre, en moyenne, si on recommence un grand nombre de fois (une infinité en théorie) le même jeu. En pratique, une stratégie de paris est intéressante si l'espérance est positive, et elle est désavantageuse (ou perdante) si l'espérance est négative.
La variance est un nombre qui exprime la dispersion des valeurs autour de l'espérance.
Par exemple, une espérance de 10 euros indique que le gain moyen sur un grand nombre de mises dans les mêmes conditions va tendre vers 10 euros. Cela n'empêche pas de gagner bien plus par moment, ou encore d'être déficitaire par moment en vivant notamment quelques bad run.
La variance associée donne l'ampleur, l'ordre de grandeur, des fluctuations auxquelles on peut, et doit !, s'attendre: Néanmoins, une série noire de pertes consécutives est rare, "rare" c'est-à-dire peu probable mathématiquement. L'inégalité de Bienaymé-Tchebychev est une formule mathématique qui permet de quantifier cette "improbabilité".

Inégalité de Bienaymé-Tchebychev

Pour une variable aléatoire X, d'espérance E et de variance V, et pour tout nombre réel a, on a
P( | X − E | ≥ a ) V / a2

Une démonstration de cette formule se trouve sur cette page.
Cette formule donne des informations sur l'interprétation de la variance en choisissant par exemple le paramètre a proportionnel à la variance. On rappelle que la variance est le carré de l'écart type: V = σ2
Pour a = σ
on obtient
P( | X − E | ≥ σ ) V / σ2 = 1
Cette formule ne nous donne en fait ici aucune information puisque toute probabilité est forcément toujours inférieure à 1.
Pour a = 2σ: fluctuation de plus de 2 écarts types
on obtient
P( | X − E | ≥ 2σ ) V / (2σ)2 = 1 / 4
Ainsi, la probabilité de s'écarter de l'espérance de 2 écarts types est inférieure à une chance sur 4.
Pour a = 3σ: fluctuation de plus de 3 écarts types
on obtient
P( | X − E | ≥ 3σ ) V / (3σ)2 = 1 / 9
Ainsi, la probabilité de s'écarter de l'espérance de 3 écarts types est inférieure à une chance sur 9.
Pour a = 4σ: fluctuation de plus de 4 écarts types
on obtient
P( | X − E | ≥ 4σ ) V / (4σ)2 = 1 / 16
Ainsi, la probabilité de s'écarter de l'espérance de 4 écarts types est inférieure à une chance sur 16.
Pour a = kσ: fluctuation de plus de k écarts types
La probabilité de s'écarter de l'espérance de k écarts types est inférieure à une chance sur k2
Par exemple donc, avec une espérance de 10 euros et un écart type de 2 euros, on peut estimer à moins de une chance sur 52=25, soit 4%, la probabilité d'être à 0 soit 5 pertes consécutives. Il s'agit là d'une probabilité loin d'être négligeable…
Plus précisément, si on suppose de plus la loi symétrique, il a moins de 2% de chance d'être négatif mais aussi moins de 2% de chance d'avoir un gain supérieur à 20 euros.

Estimation du risque

La notion de risque, dans des investissements financiers comme dans des paris sportifs, correspond à la possibilité que les investissements ne produisent pas le rendement attendu.
Le rendement attendu est modélisé par l'espérance et, comme on l'a (re)vu ci-dessus, les gains peuvent nettement fluctuer autour de cette valeur.
Grâce à l'inégalité de Bienaymé-Tchebychev, qui utilise l'espérance du modèle mais aussi sa variance, on peut estimer le risque que le gain soit inférieur à k écart type est inférieur à une chance sur k2

Probabilité du risque d'un bad run

L'inégalité de Bienaymé-Tchebychev est une formule mathématique très forte car elle ne présuppose aucune hypothèse sur la loi de probabilité considérée: elle est juste toujours vraie, pour toute variable aléatoire d'espérance E et d'écart type σ (donc de variance V = σ2).
Si on connaît de plus par exemple la probabilité de gain, on peut être plus précis. Par exemple, si je me concentre sur des paris avec une cote de 1,5, donc une probabilité de victoire de 1/1,5 ≃ 66%. Il reste donc une chance sur 3 (≃ 33% de chance) de perdre.
Pour espérer des gains conséquents sur le long terme, il faut mutlipler les paris. Même avec une cote assez favorable de 1,5, un bad run, une succession de 4 ou 5 pertes consécutives n'est pas si rare et on doit s'y attendre de l'ordre de une fois sur 100…

Conclusion et gestion du risque

Les paris sportifs sont des investissements risqué, c'est un fait. Mais le risque n'est pas une fatalité incontrôlable.
L'inégalité de Bienaymé-Tchebychev, et le calcul des probabilités permettent d'estimer, de prévoir, ces risques: combien peut-on s'attendre à perdre ? avec quelle probabilité ?
En utilisant ces outils, un parieur rigoureux pourra clairement éviter des mises surdimensionné et de risquer la banqueroute, c'est-à-dire de perdre la totalité de sa bankroll à cause d'un mauvais bad run ou autre bad bit.

Pour compléter ces outils, on peut aussi citer le critère de Kelly qui permet de dimensionner de manière optimale ses mises et tenant ainsi, entre autre, à l'écart la faillite, ou encore la méthode Miller qui est une stratégie de mise globale visant à garantir un rendement constant.


Voir aussi: